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Prendre rendez-vousLe label de production biologique de l’Union européenne peut-il être délivré et apposé sur des produits issus d’animaux ayant fait l’objet d’un abattage rituel sans étourdissement préalable ?
C’est à cette question qu’a dû répondre la Cour de justice de l’Union européenne dans un arrêt du 26 février 2019, opposant l’association de protection animale « Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs », au ministère de l’agriculture, ainsi qu’à la société Bionoor, à l’organisme de certification Ecocert et à l’INAO.
En 2012, l’association s’était en effet vu refuser sa demande formulée auprès du ministère d’interdire la commercialisation et la publicité de steaks hachés de viande bovine « Tendre France » de la société Bionoor certifiés « halal » et comportant la mention « Agriculture Biologique ». Elle demandait de façon plus générale l’interdiction d’utiliser la mention AB sur les viandes issues d’animaux abattus sans étourdissement préalable.
Devant la Cour d’appel, l’association alléguait que cette méthode d’abattage ne répondait pas à l’un des objectifs généraux des règlements 834/2007 et 889/2008 encadrant la production biologique : le respect de normes élevées en matière de bien-être animal. En outre, bien que le règlement 1099/2009 relatif à la protection des animaux au moment de leur mise à mort prévoit une dérogation au principe d’étourdissement dans le cadre d’un abattage pour motif religieux, celle-ci « répondrait uniquement à des objectifs de police sanitaire et d’égal respect des croyances et traditions religieuses ». L’association considérait enfin que la certification « halal » méconnaitrait le principe de confiance des consommateurs à l’égard des produits biologiques.
Les défendeurs soutenaient qu’aucune disposition des règlements sur l’agriculture biologique ne s’oppose explicitement à ce qu’il soit dérogé à la règle de l’étourdissement avant abattage, et qu’ainsi il n’existerait pas d’incompatibilité de principe entre la production biologique et l’abattage rituel destiné à garantir la liberté d’exercice du culte. Le principe de confiance du consommateur ne serait, par ailleurs, pas méconnu, dès lors que l’usage de la mention « AB » aurait été autorisé à bon droit.
La Cour d’appel, estimant qu’aucun des règlements précités ne définit expressément le ou les modes d’abattage des animaux aptes à répondre aux objectifs de bien-être animal et de réduction de la souffrance animale assignés à la production biologique, a donc décidé de surseoir à statuer.
Pour la Cour de justice, le règlement 834/2007 doit être interprété en ce sens qu’il n’autorise pas l’apposition du logo de production biologique de l’UE sur des produits issus d’animaux ayant fait l’objet d’un abattage rituel sans étourdissement préalable.
Le législateur, en soulignant sa volonté d’assurer un niveau élevé de bien-être animal en agriculture biologique à travers les textes précités, « a entendu mettre en exergue que ce mode de production […] se caractérise par l’observation de normes renforcées en matière de bien-être animal dans tous les lieux et à tous les stades de cette production où il est possible d’améliorer encore davantage ce bien-être ».
Cet objectif est d’ailleurs concrétisé par une disposition du règlement 834/2007 qui prévoit l’obligation de réduire au minimum toute souffrance animale, pendant toute sa durée de vie, dont l’abattage (art. 14, ¡1, b), viii)). Or tel n’est pas le cas de l’abattage rituel qui, selon la Cour, n’est pas de nature à atténuer toute douleur aussi efficacement qu’un abattage avec étourdissement, celui-ci étant nécessaire pour provoquer un état d’inconscience et de perte de sensibilité.
Enfin, la Cour relève que le considérant 22 du règlement 834/2007 fixe un objectif de préservation de la confiance des consommateurs à l’égard des produits biologiques. Ainsi, il doit être garanti aux consommateurs que les produits étiquetés bio ont été effectivement obtenus dans le respect de ces normes élevées en matière de bien-être animal.